Épreuves de nationalité
mars 2025
Le droit d’avoir une nationalité est proclamé par la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. Or le droit de la nationalité est complexe, régulièrement instrumentalisé et marqué par une forme de dispersion. Ses contours varient d’abord dans le temps : l’accès à la nationalité est facilité puis restreint selon que l’on se trouve en période de guerre, de crise nationale ou de recherche de bouc émissaire. À rebours du principe d’unité de la Nation, il fluctue également dans l’espace puisqu’il s’applique différemment dans l’Hexagone et à Mayotte, pourtant département français depuis 2011. Enfin, la pratique du droit de la nationalité fait apparaître de multiples distinctions entre les personnes concernées, selon l’état de fortune, l’origine (ancienne colonie ou pays occidental) et la position de genre. Aussi, Délibérée a-t-elle choisi d’aborder dans ce nouveau numéro la géométrie variable de la nationalité et le rôle de la Justice dans ce processus.
L’exploration de ce sujet rappelle que, derrière une politique de chiffres, ce sont des vies bouleversées, et que l’appartenance nationale présente pour certain·es un caractère éphémère et fragile, une forme ordinaire de violence d’État et d’état (civil). Tout changement juridique a des effets très réels – où on (re)devient soudainement étranger·ère. La nationalité est le règne par excellence du souverain et du dérogatoire, et la justice, souvent écartée, doit y reprendre sa place.